mercredi 24 juin 2009

Audimat


Qu'est-ce que je fais de mes journées ?

Rien.

Je suis allongée sur mon lit et je regarde la télé.

Je regarde Secret Story. Les trois fois. A 11h, à 18h et à 2h du mat.
Et des documentaires aussi. Les chats des ruines de Rome. Les routes de l'impossible.

Et les feuilletons du matin sur la 2. En fait je suis sur la 2 à partir de 6h et demie le matin. William Leymergie.
A 7h30 je passe sur Canal. Maitena. Le Zapping, les infos. Beaugrand.
En général je m'endors toutes les trois minutes. Pas facile à suivre.

Avant à 9h je passais sur la Cinq. Les Maternelles. Mais là ils repassent des vieilles émissions.
Du coup je regarde Amour Gloire et Beauté jusqu'au bout.
Non mais là y avait un suspense terrible ! Stéphanie, la vieille méchante, elle étranglait Brooke, la blonde méchante, avec ... tu le croiras pas .... le fil du téléphone ! Le truc trop crédible, en 2009 un téléphone AVEC UN FIL, un vrai, à l'ancienne, tout en tire-bouchon...
Le plus terrible, c'est qu'elle s'est jetée sur la pôôôvre Brooke juste à la dernière minute de l'épisode de mardi. J'étais o-bli-gée de regarder ce matin.
Pff, à 8 minutes du début, Brooke s'est libérée, trop facile. Mais là, attention, Stéphanie l'a enfermée à CLÉ ! Dernière minute de l'épisode encore. Je dois regarder demain matin. Obligée.

Ah et aussi à 10h c'est la Une. Le Mag je crois. Ça va, ce sont des sujets ultra courts. Ils ont un zapping eux aussi, un peu avant 11h. Entre leurs deux horoscopes dans le désordre. Je ne sais pas pourquoi ils font ça : ils donnent l'horoscope en mélangeant tous les signes. Du coup tu ne sais jamais quand est-ce que ce sera le tien.
C'est un peu déstabilisant. Avec les années, je connais par coeur la succesion des signes... Ça me trouble d'entendre Verseau juste après Balance. Vraiment.
Alors je file me faire chauffer un bol de chocolat.

Midi : Nagui.
"Tout le monde veut prendre ..? SA PLAAACE !!" Je gueule avec le public, je montre "la place du champion" avec lui.
J'adore quand les candidats racontent leurs anecdotes. En général, Nagui les met en boîte, il est trop con des fois. Ça me fait rire.

Au générique de fin je zappe sur la Une, je tombe sur la question finale d'Attention à la marche. Je déteste ce jeu. Je ne trouve JAMAIS la bonne réponse. Soit les Fançais sont des menteurs, soit je ne les comprends pas du tout. Ou les deux.

13h, Jean-Pierre Pernaut et ses villages du fin fond de la Fance profonde. Il sourit quand le reportage parle de gamins. Je m'endors toujours vers et quart. Son "mot de la Bourse qui plonge aujpourd'hui" me réveille, sinon c'est le jingle de la météo, toujours plus fort.

Je passe sur la Cinq, le Magazine de la Santé. Ah, j'aime bien Michel Cymes, dès qu'il y a un sous-entendu sexe à faire, il est là. Un peu comme Nagui.
Je les ai beaucoup regardés pour préparer mon concours AP, en 2004. C'est super bien fait comme émission, les gamins n'aiment pas parce qu'il y a des opérations filmées en gros plan bien gore. Je me souviens encore de la femme à qui ils ont retourné le vagin à l'envers, dehors, pour lui retirer une tumeur sans l'ouvrir. Brrr...

Si je ne me secoue pas je m'endors. Encore. Ou alors je regarde le film débile sur la 6. Il y en a deux ces temps-ci, vers 2h et vers 3h et demie. Mais aussi sur la Une, à 3h. Des bébés échangés à la naissance, des femmes trompées qui font suivre leur mari, des meurtriers qui cachent trop trop bien leur jeu qu'on dirait jamais que la deuxième femme elle va se faire tuer aussi si elle n'arrête pas immédiatement d'avoir des soupçons non mais !
Quand c'est allemand autant zapper de suite, c'est archi nul. Après si c'est canadien faut voir, souvent c'est très cucul la praline, des jeunes étudiantes, des joueurs de hockey, tout ça. Et puis les vieux téléfilms américains des années 90, ouais bof. Ce qui m'éclate le plus c'est que je me suis habillée comme ça, je me suis coiffée comme ça, ouh la honte...

17h30, Des chiffres et des lettres : je deviens super forte au Compte est bon, et je ne trouve plus rien au Mot le plus long. L'âge. Le son est dégueulasse, faut que j'augmente aux deux tiers, et forcément ça hurle à la coupure au milieu. Ça m'énerve. Comme leurs commentaires débiles.

18h, la 6, le Dîner presque parfait. Maintenant je ne regarde plus que le premier quart d'heure : ça me donne faim chaque fois, et envie de faire la cuisine.
Quand je regardais jusqu'au bout j'étais stupéfaite par les commentaires faux-cul des convives. Ils portent bien leur nom des fois, de vrais cons. Vives. "Et la glace c'est toi qui l'as faite ? Et le foie gras c'est toi qui l'as fait ? Et la pâte de la tarte c'est toi qui l'as faite ? Ah." Systématiquement il y en a un ou plusieurs qui dé-tes-tent ce qu'on leur sert : poisson, moules, roquefort, agneau... Chais pas moi, si tu t'inscris à une émission où tu dois manger chez les autres, laisse tomber les "je ne bois pas d'alcool - je ne mange pas de fromage / de porc / de viande pas hallal /de fruits de mer" !

Bref. Non mais là, le summum de la débilité est ENFIN revenu sur les écrans : Secret Story ! Incroyable... Tous les soirs je reste scotchée par autant de crétinisme en concentré. Tout y est : le fric, le sexe, l'hypocrisie, les bastons. La connerie. C 'est tellement exagéré que ça en devient drôle, vraiment.

J'enchaîne sur la Famille en or. Les infos sur la 6. Malcolm. En général je mange. Ou pas. Si j'ai la flemme je ne bouge pas. J'attends le film ou le doc de la 1ère partie de soirée. Je continue sur le doc ou la série de la deuxième partie de soirée. Tout ça nous amenant en douceur vers les minuit. Ou plus.

Je pique du nez, je programme la minuterie pour 45 minutes. Quand la télé s'éteint ça me réveille, alors je la rallume. Je tombe sur des policiers allemands ou italiens, des rediffusions, des documentaires barbants. Je me rendors, en reprogrammant la minuterie. Me re-réveille.

Des fois c'est intéressant, je regarde, et ça me réveille tout à fait. Sauf qu'après, ça redevient très nul, et je n'ai plus sommeil.
D'autres fois c'est très intéressant mais je n'arrive pas à rester réveillée. Alors je m'endors et je me réveille en sursaut au générique de fin, et je ne sais pas qui a tué, ou pourquoi les mères porteuses c'est le mal, ou comment la BAC de Versailles a fini par choper le grand méchant caïd qu'ils traquaient depuis le début de l'émission.
Là en général j'ai mal au crâne, je bave, j'ai faim et trop envie de faire pipi. Du coup je ne me rendors pas de suite, et je zappe sans rien trouver : en même temps, je n'ai que 5 chaînes, le choix est limité. Ma télécommande a les boutons 7, 8 et 9 qui n'ont jamais servi.

Je lâche prise régulièrement vers 3h du mat. Sommeil agité, plein de rêves et de cauchemars.
A 5h et demi, j'ai déjà rallumé, Yves Calvi sur la Cinq et le ronron de ses invités me berce pour une heure supplémentaire, à moitié réveillée, dans un coma sirupeux.

La journée commence.

Y a rien à la télé...

dimanche 21 juin 2009

Au boulot


C'est bien joli de passer son temps à pleurnicher sur son pauvre petit nombril mais ça ne fait pas avancer le schilmiblik.

Je n'ai pas vraiment le choix : soit je baisse les bras, je laisse tomber, et je détruis à jamais la vie de mes enfants en supprimant la mienne. Soit je serre les dents, une fois de plus, et je fonce sans me poser de questions, et sans laisser d'autres me dicter ma conduite.

Donc je ressors mes projets, je me force à y croire, y a pas de raisons, ça va marcher. On dit que l'appétit vient en mangeant. A table...

La semaine dernière, j'ai cousu un porte-bébé pour ma fille : elle avait envie d'essayer le système du mei tai, sorte de sac à dos à bébé.
Essai peu concluant : les noeuds ça la gonfle, en plus au fur et à mesure de la balade il descend (alors que sur les démos il semble rester bien en haut ?!?), et je trouve que les bretelles, à plis pour bien répartir la charge sur les épaules, sont trop couvrantes, du coup elle a chaud très vite.
Point positif : Mister Monster adore, il a vite compris que ça voulait dire "balade" ! Il danse et saute dans le truc, et gratouille le dos de sa mère... mais la position lui permet de tout scruter sans rien perdre du spectacle autour : dans l'écharpe, son champ de vision était beaucoup plus limité.
Petite fierté pour moi : à la première sortie, une maman est venue demander à ma fille où elle l'avait acheté, parce qu'elle le trouvait très joli !

Bon, je vais y apporter quelques modifs, et hop ! production en chaîne !
Objectif numéro 8 bis : en vendre plein pour gagner plein de sous...

samedi 20 juin 2009

Travelling arrière

Il est 21h.
Je comate devant la télé, des rires enregistrés, Arthur et ses éternels invités s'amusent.
J'ai fait la vaisselle pendant que les frites doraient, passé la serpillière, mangé pendant que ça séchait.

Il est 18h.
Les voisins dans la rue parlent fort et rient sous mes fenêtres ouvertes, mon mal de crâne s'est définitivement installé.
J'ai lu la moitié d'un bouquin que j'aurais dû rapporter il y a une semaine à la bibliothèque.

Il est 15h.
Mes larmes coulent en silence sur mon oreiller, j'ai du mal à respirer.
Les filles viennent de partir, dans un dernier éclat de rire. J'ai fermé la porte et je me suis allongée.

Il est midi.
L'ombre de la cuisine après la balade au soleil, dans les rues sales. La télé en fond sonore, les jingles familiers, encore des rires : complicité des heures calmes avant la sieste.
Je fais chauffer les légumes, nourris la tribu et le bébé affamé, fatigué. Pas envie de manger, j'ai un peu mal à la tête.

Il est 9h.
La salle d'attente est vide, les magazines bien empilés. Derrière la porte un petit se fait vacciner, hurlements.
Énième visite chez mon médecin, on tourne en rond, il n'a rien, ne sait rien, me prescrit encore des cachets et des sirops en rafale, remplit des papiers.

Il est 6h.
Le bébé s'agite dans son lit, il grogne et gémit, mes filles dorment de l'autre côté.
Depuis sa dernière tétée, je n'ai pas pu me rendormir, dans ma tête un ballet fou danse une ronde infernale : est-ce que j'ai vraiment tout imaginé ?

Il est 3h.
La télé ronronne, ma fille a éteint l'ordinateur et s'est endormie à son tour.
Dans son lit près de moi, le bébé digère, un sourire aux lèvres. Sa mère sursaute de temps en temps, se retourne et se rendort.
Dehors le vent s'est levé, le rideau s'agite aux rythmes des bourrasques, ses ombres légères enlacent mes idées sombres. Je ne sais pas quoi faire.

Il est minuit.
Petit à petit le sommeil a eu raison de la plupart d'entre nous, seule ma fille fait face à son écran bleu, le bruit léger des touches du clavier accompagne mes battements de paupière.
L'hôpital, la voiture, mes cachets, des tonnes de papiers, une bouteille, l'autoroute, des portes qui claquent... mes enfants. Tout s'emmêle, et le docteur hurle : "Vous n'avez rien...Vous n'avez rien !" Je me réveille le coeur battant.

Jeudi après-midi, le médecin-conseil a lourdement insisté pour que j'accepte un séjour en unité psychiatrique. Ensuite l'assistante sociale a écrit à ma place la lettre demandant un congé longue durée. Et quand nous avons passé le péage de l'autoroute, contrôle de gendarmerie, "soyez prudente.. n'ayez pas d'accident... allez-y madame faites attention !"
J'ai cette impression étrange que je me suis perdue. Je ne sais plus où j'en suis, quelle route prendre, quelle direction doit être la mienne maintenant.

Je vais m'arrêter.

Le monde est stone

Je cherche le soleil
Au milieu de ma nuit
J' sais pas si c'est la Terre
Qui tourne à l'envers
Ou bien si c'est moi
Qui m'fait du cinéma
Qui m'fait mon cinéma...

J'ai plus envie de m'battre
J'ai plus envie d'courir...

jeudi 18 juin 2009

Fatiguée

Hier, de 11h à 13h, j'ai subi la visite de l'assistante sociale de l'Inspection.
Elle a passé deux heures à éplucher ma situation, et surtout à tenter de me convaincre de ne pas démissionner. Chaque fois que je prononçais le mot, elle s'énervait, et me vantait les mérites de la dispo plutôt : "Comme ça vous aurez le temps de réfléchir, et surtout vous pourrez retrouver un poste...."
Pas moyen d'argumenter, impossible de libérer l'avenir, MON avenir ! Je suis remontée chez moi épuisée, la tête en vrac, juste sûre d'une chose : ce n'est pas à moi de choisir.

J'ai ensuite pris de plein fouet, le soir, le discours suffisant et péremptoire d'un toubib déjà parti en vacances, qui ne connaît ni mon dossier, ni les souffrances qui m'ont amenée dans son bureau. Je suis rentrée chez moi abasourdie, incapable de rassembler les milliers de morceaux de moi qu'il avait éparpillés en quelques phrases bien senties.

J'ai passé la nuit à attendre que le jour revienne.
Je me suis plongée dans les photos de mes enfants, de mon petit-fils, leurs sourires, leurs délires, pour rester là, avec eux, ne pas faire de conneries, ne pas me foutre en l'air.
Et parfois je m'enfuyais, je descendais en courant, l'air de la rue pour balayer mes souvenirs, les images de cette journée, des jours d'avant. Je courais et m'arrêtais, essoufflée, à bout de forces, vidée. Je rentrais à petits pas. Et tout recommençait.

Il est huit heures du matin. J'ai rendez-vous cet après-midi à Montpellier, avec le Médecin-Conseil de l'Inspection. Et je dois passer voir ensuite l'assistante sociale, pour préparer mon passage en commission, cet été.
Ma fille m'attend, je dois l'emmener voir son conseiller ANPE, pour le financement de son école, l'année prochaine. Demain elle a sa journée d'inscription, ici, donc elle dort chez moi ce soir, avec son bébé.

Il est huit heures du matin. Je suis face à une longue journée, une de plus. Avant celle de demain. Et puis le WE. La dernière semaine de juin. L'été.
Je ne sais plus à quoi ça sert, tout ça.
Je suis fatiguée.

mercredi 17 juin 2009

Discrète

"Bonjour.. Mme TrucMachin ? Allons-y..."
J'avance, je ne dis rien.
"Fermez la porte, asseyez-vous."
Je ferme, m'asseois, je ne dis rien.
"Voyons... je relis un peu votre dossier pour me le remettre en mémoire n'est-ce pas ?"
Je ne dis rien.
"Hum, oui, huhum, oui, oui, je n'ai pas... Hum... Je n'ai pas le résultat de votre myélogramme..."
Je ne dis rien.
"Bonjour ici le Dr 9DC, je vous appelle parce que je n'ai pas le résultat d'un myélogramme que j'ai envoyé il y a un moment..."
Je lève les yeux pour ne pas pleurer, je ne dis rien.
"Hahan... oui... hum... oui... oui oui, je vois ça... han han... oui... ok... oui... Bien... Vous m'envoyez tout ça ? Ok."
Je ne dis rien.
"Donc en fait, voyez-vous, je viens juste de prendre connaissance de vos résultats. Bien, effectivement, on a donc confirmation des différentes anomalies de votre formule sanguine..."
Je ne dis rien.
"Personnellement j'aurais tendance à ne pas m'y attacher, voyez-vous ce sont des anomalies discrètes, multiples il est vrai *tapote les feuilles du dossier sur son bureau*... on retrouve des anomalies à différents stades de formation de l'hémoglobine... huhum... mais discrètes... *se renverse sur son fauteuil les mains croisées sur son ventre* donc je dirais... que vous n'êtes pas malade."
Je ne dis rien.
"Bien... Disons qu'actuellement, seule l'anémie * se penche vers moi en me transperçant du regard* im-por-tan-te ! cette anémie. Étonnante !... Vous en êtes à moins de 9 grammes d'hémoglobine ! Vous ne POU-VEZ-PAS vous balader avec 9 grammes d'hémoglobine !!"
Je ne dis rien.
"Alors voilà, moi je pense qu'on va s'attaquer à cette anémie, à ce qui la cause, et puis le reste, eh bien, comme je vous l'ai dit, on ne s'y attarde pas *me jette un coup d'oeil* parce qu'effectivement, vous avez des anticorps anti-ADN, et d'autres.. hum... marqueurs... hum... qui... mais voyez-vous, ils ne sont là qu'en tant que ... comment dire ?... témoins !"
Je baisse les yeux, ne dis rien.
"Donc voilà ! vous allez prendre du fer, et puis... et bien... euh... *feuillète le dossier devant lui* je vois que vous prenez du Ferrostrane ?"
Mon menton plonge pour dire oui.
"Vous allez continuer, hein... et puis retournez voir votre gynéco, reprenez une contraception hormonale, n'est-ce pas. A votre âge, la première cause d'anémie chez...les...*moue légèrement méprisante*...femmes est gynécologique. Donc ..."

Voilà. Il est renversé sur son fauteuil, se balançant légèrement, les doigts en triangle devant son menton. Il ne dit plus rien.
Alors je fais passer mon trousseau de clés dans l'autre main, serre mon classeur bleu contre moi, je me lève et me dirige vers la porte.
Sans rien dire.
Il me suit, me tend la main. Je la serre à peine, je m'enfuis, courant presque dans le long couloir étroit.

discrète : qui agit avec réserve. - qui sait garder un secret. - qui n'attire pas l'attention.
Ça a duré 18 minutes. Je n'ai rien pu dire. Comme mes anomalies.

Lentement, mais toujours en avant


"Encyclopédie du savoir relatif et absolu, Edmond Wells

Vaut-il mieux avoir le squelette à l'intérieur ou à l'extérieur du corps ?

Lorsque le squelette est à l'extérieur, il forme une carrosserie protectrice. La chair est à l'abri des dangers extérieurs mais elle devient flasque et presque liquide. Et lorsqu'une pointe arrive à passer malgré toute la carapace, les dégâts sont irrémédiables.

Lorsque le squelette ne forme qu'une barre mince et rigide à l'intérieur de la masse, la chair palpitante est exposée à toutes les agressions. Les blessures sont multiples et permanentes. Mais justement, cette faiblesse apparente force le muscle à durcir et la fibre à résister. La chair évolue.

J'ai vu des humains qui avaient forgé grâce à leur esprit des carapaces intellectuelles les protégeant des contrariétés. Ils semblaient plus solides que la moyenne. Ils disaient : "Je m'en fous" et riaient de tout. Mais lorsqu'une contrariété arrivait à passer leur carapace les dégâts étaient terribles.
J'ai vu des humains souffrir de la moindre contrariété, du moindre effleurement, mais leur esprit ne se fermait pas pour autant, ils restaient sensibles à tout et apprenaient de chaque agression."

Bernard Werber - Les fourmis

J'ai rendez-vous ce soir, à 17 heures.



dimanche 7 juin 2009

Le travail c'est la santé


Fin janvier j'ai vu mon Inspectrice (oui on est comme ça dans l'Éducation Nationale, très possessif avec tout et n'importe quoi, MON Inspectrice, MES parents d'élèves, MON Conseil de cycle..) et je lui ai dit que je voulais démissionner.
Alors déjà, elle ne connaissait absolument pas la procédure à suivre - "vous comprenez, c'est la première fois en 20 ans que j'ai une telle demande !" Ah bon ? Je pensais que les pétages de plomb étaient plus courants pourtant.
Donc, on a découvert ensemble que la letttre - brillante et un peu désespérée - qui exposait mon projet devait effectivement passer par elle avant d'atterrir à l'Inspection Académique : ça a pris 5 semaines.
Ensuite, l'Inspection m'a répondu (encore 4 semaines de plus) "d'user de préférence de tous mes droits à congé maladie"... J'ai trouvé ça stupéfiant : je croyais que la Sécu avait un trou énooormissime, et qu'il fallait se battre contre les arrêts abusifs, et tous ces fainéants qui profitent du système ?
J'appelle l'Inspectrice, pour lui rappeler que je veux avant tout me libérer, pour passer à autre chose. Elle enregistre ma décision, essaie encore un peu de me convaincre de réfléchir, d'attendre (mais attendre quoi ?)
Huit jours plus tard - nous en sommes début avril - nouveau courrier : cette fois on me propose de prendre ma retraite. J'ai 4 enfants, et plus de 15 ans de Fonction Publique, donc j'ai accès à la "jouissance immédiate".
Non non, calmez-vous, rien de cochon dans cette drôle d'expression ! Ça veut simplement dire que si j'accepte la mise à la retraite, je toucherai ma pension dès le premier mois, sans attendre l'âge respectable de 60 ans ( ou plus, vu comme c'est parti...) Montant faramineux : 1000 euros bruts mensuels...
A l'époque je suis en plein dans mes démarches pour faire autre chose. C'est aussi le mois où je porte mon fils à bout de bras pour ne pas qu'il coule. J'ignore donc ce courrier.
Fin avril, rendez-vous avec l'interniste, je suis à cran. C'est l'entrée en scène de l'assistante sociale : plus crampon tu meurs ! Coups de téléphone, messages interminables sur le répondeur, visites... Elle appelle mes collègues, mon docteur, elle s'incruste chez ma propriétaire et interroge mes voisins.
Je déteste les assistantes sociales. Celle-là ne me réconcilie pas avec la profession.
Quinze jours de harcèlement plus tard, visite de contrôle à mon domicile par un médecin-conseil : évidemment, il faut que ce soit le jour de mon hospitalisation ! Évidemment, il ne me trouve pas, et en réfère à l'Inspection...
Très logiquement, lettre recommandée, injonction de me présenter à son cabinet le 29 mai à 10h, "suite à ma visite infructueuse du 12 mai à 15h30 à votre domicile".
Tout aussi logiquement, qui se présente au cabinet du bon docteur à 15h30 le vendredi 29 mai ?
La grosse pouffiasse blonde à l'accueil me gratifie d'un merveilleux "Et vous êtes instit ? vous leur apprenez à lire comment à vos élèves ?". Sans aucun égard pour les larmes qui me montent aux yeux, elle me fixe un nouveau rendez-vous pour le mardi suivant.
Sauf que..
Le mardi suivant, j'ai fui, et j'ai complètement oublié ce rendez-vous. Je suis chez ma fille. Nouvelle lettre recommandée. Nouvelle injonction de me présenter.
J'y suis allée hier matin. L'haleine un peu chargée...
Je suis officiellement placée en congé prolongé pour Affection de Longue Durée.
Quelqu'un peut s'occuper de récupérer mes résultats ?

samedi 6 juin 2009

Vivre

Il était une fois une histoire sans fin.

Vendredi 29 mai, pas de courrier, je vais voir mon toubib et lui demande d'intervenir, peut-être pourrait-il en savoir plus...
Pas de résultats, il faut attendre, attendre.
Je passe le WE en tête-à-tête avec ma bouteille, que je vide. Mardi je m'enfuis chez mes filles, j'y reste toute la semaine, à m'étourdir des rires de mon petit-fils. Je m'active, range, fais la cuisine, bricole, pour ne plus penser, pour oublier. Pour ne pas hurler.

Vendredi 5 juin, je suis rentrée. Pas de courrier, je vais voir mon toubib et lui demande d'intervenir, peut-être pourrait-il en savoir plus...
Pas de résultats, il faut attendre, attendre.
Je suis passée m'acheter une autre bouteille. Pour ne plus hurler.