lundi 21 juillet 2014

"J'y étais presque..."


J'allais... au choix.... prendre mon pied.... toucher plus... éviter la pluie... attraper le bus... être embauchée...
J'ai failli... t'épater, me fâcher, gagner, pleurer, m'envoler, vous tuer.
J'aurais pu...

Je suis plongée dans la lecture d'un bouquin passionnant : "Que dites-vous après avoir dit Bonjour ?" d'Éric Berne - le père de l'analyse transactionnelle. J'avais découvert ses travaux avec G., mon "extra-terrestre", celui qui m'a remis la tête sur les épaules et le vagin entre les cuisses, après mon divorce.
Pas facile de résumer en quelques mots... d'autant plus que ce soir, j'ai "fêté" la fin de mes deux semaines de vacances, avec une bouteille de vin blanc au sirop de cerises, mioum... Précisons que ma zazoune en a bu 2 verres quand même... et s'est chargée de chercher la musique sur gogol mon ami, pour le karaoké fort sympathique qui a suivi, coucou les voisins, oui oui on habite en bas, et on est là ce soir, haha !

Analyse transactionnelle donc. A base de scénario tracé dans la petite enfance, renforcé ensuite, et qui se joue jusqu'à l'aboutissement, tragique ou non suivant que vous soyez un gagnant, ou un perdant.
Je suis une perdante.
Ttttttt ne protestez pas, je perds courageusement mais je perds quand même. C'est dit.
Bon, demain je serai plus en état de vous expliquer les pourquoi et même les comment, disons que ce soir, j'entends mes parents me répéter : "T'as rien d'autre à faire que lire ?" 
Et je me revois me planquer sous la nappe de la table, ou dans le coin du mur derrière le buffet, un livre sous le nez, encore, toujours, jusqu'à ce qu'ils me cherchent, jusqu'à ce qu'ils me trouvent et me tombent dessus.

Mon père travaillait dur, beaucoup. Pour pas grand-chose. Il se mettait des culottes sur la tête et se déguisait, pour nous faire rire. Et on riait ! 
Mon père voulait qu'on réussisse, il nous disait : "Travaillez ! On n'arrive à rien sans efforts !" et son amour nous submergeait.

Ma mère jouait aux courses. Elle hurlait beaucoup, nous frappait encore plus. Je la revois allongée sur le canapé. Et je vois nos affaires, dans la poussière du balai qu'elle balançait rageusement. 
Il nous fallait nous appliquer, pour tout, pour montrer aux autres à quel point elle était une mère parfaite, merveilleuse, compétente et précieuse... Réussir à l'école, obéir, être mignonne...
Beaucoup d'hommes ont défilé à la maison, avant, pendant, après le divorce. Mon père l'aimait, il aurait tout pardonné. Il pleurait, elle riait. Il buvait.

Elle m'a appris que si je voulais quelque chose, je devais l'échanger contre un effort, plus ou moins grand, mais pas forcément honnête. Je pouvais tricher, séduire, mentir, du moment que j'obtenais ce que je convoitais.
Je l'ai vue aussi très appréciée dans son travail, d'abord prof, puis proviseur, sans comprendre, sans pouvoir faire le lien, logique, entre cette femme qui ne fichait rien, et celle dont nous parlaient les autres. C'était injuste vraiment, de récolter tant de compliments, pour si peu d'efforts.

Alors je lisais en cachette, je m'appliquais en classe, je cherchais à éviter les coups, et les disputes de mes parents me terrifiaient.
Je voulais être sage-femme, j'ai fini instit. Je me suis mariée, pour la défier, ou pour la fuir, elle l'a adopté, et l'a mieux traité que son propre fils.
J'ai divorcé, j'ai démissionné, j'ai bu et j'ai couché avec des tas d'hommes. J'ai aimé à en mourir. J'ai eu des enfants. J'ai déménagé.

Mon père s'est remarié le premier. Il regrette ma démission, et me pousse à redevenir fonctionnaire. Ma mère continue à me frapper, avec des mots que je ne sais pas toujours esquiver. Je les vois vieillir.

"Tu n'y arriveras pas, même si tu essaies"
C'est le scénario qu'ils m'ont donné, et je m'applique à le suivre. Comme Sisyphe qui pousse son rocher, à chaque fois que j'approche du but, je lâche tout en accusant les autres, "c'est pas ma faute !"
La rage et la frustration m'habitent en permanence, je ne vis que sur des "Si..." et je te promets que demain, demain, ha, tu verras un peu !...
Je ne fais rien. 

Mes vacances sont finies. Je n'ai pas envie d'être à demain.