mardi 12 mai 2020

Le subterfuge


J'ai longtemps souffert de ce qu'on appelle le syndrome de l'imposteur.
Incapable de me croire capable.

De peur d'être démasquée, je sabotais mon boulot, juste pour que les critiques soient justifiées quand elles tomberaient. Ne pas finir ce que je commençais, ne pas commencer de manière à finir à temps, ou correctement. Savoir précisément ce qui était attendu... et ne pas le fournir.


Procrastination... Fainéantise... Lenteur... Mollesse...
A bien y réfléchir, j'ai encaissé des jugements bien pires que celui que je croyais mériter.
Mais chaque flèche renforçait mon sentiment de ne pas valoir grand chose en réalité, et c'était bien.

Dernièrement, un souvenir m'est revenu. Lorsque mon ado de fiston jouait à Need for Speed, un jeu de courses automobiles, il avait l'habitude de doubler tous ses adversaires à la dernière minute ou presque. Il exultait, se vantait d'être le seul à connaître "le subterfuge"... J'ai mis plusieurs mois à comprendre qu'il parlait en réalité d'un raccourci. Comment les deux mots se sont-ils télescopés ? Mystère.

Je n'aurais pas pu trouver meilleure illustration pourtant. Moi aussi, j'étais la seule à utiliser ce raccourci, ce subterfuge machiavélique, qui conduisait au plus vite à ma chute du piédestal. J'accélérais la découverte de mon incompétence, de peur d'être récompensée.

Aujourd'hui, j'ai changé de lunettes. Ce monde me mérite, et j'y ai ma place.
Je ne suis pas parfaite, oh loin de là : certaines blessures cicatrisent mal, et j'en souffre encore, je le sais. Et alors ? Est-ce que je dois dégonfler tous les pneus de ma voiture parce que j'ai roulé sur un clou ?


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