dimanche 15 janvier 2012

Chaque jour


J'ai deux billets de retard. Ils sont à l'état de brouillon sur mon disque dur, mais pas encore publiables.
En les attendant, en exclu mondiale interplanétaire, un petit bout de L4.... Livre 4 pour les intimes... Je vois bien Catherine Frot dans le rôle de Mme Truc, et Mélanie Doutey dans celui de la jeune. Ou Marina Foïs. Parce que je les aime bien.

Extrait.

"- Ben oui mais je ne crois pas en Dieu.
Vous avez tort.
Un silence. Comme chaque fois que Mme T assénait cette phrase, XXX attendit. Ce n'était jamais long avant qu'elle apprenne pourquoi, cette fois encore, elle avait tort.
Mais aujourd'hui, le silence s'éternisait. Absorbée par son ordinateur, Mme T semblait avoir oublié qu'elle avait pris violemment à partie sa jeune collègue, quelques minutes auparavant. Les joues encore cuisantes de l'échange, elle se leva, décrocha sa veste du porte-manteau, et s'enfuit dans le couloir, tremblante, au bord des larmes.
Mais quand cesserait-elle de s'écraser ainsi devant tout le monde ? Le souffle court, elle marchait d'un pas rapide vers l'escalier, les murs tristes glissaient tout autour d'elle, l'oppressant davantage. C'est décidé, quand je reviens je vais tout lui dire à cette vieille taupe ! Mais pour qui elle se prend, c'est pas ma mère hein, de quel droit elle me balance tout ça , hein ?! Ses larmes coulaient maintenant. Ce n'est pas ma mère, non, c'est celle de Julien...
Dans le bureau, Mme T tapait nerveusement sur son clavier. Une fois de plus, la petite s'était enfuie. Ça l'agaçait prodigieusement, et sa colère l'enveloppait d'un brouillard rouge et dense, elle aurait volontiers hurlé pour en sortir. Elle frappait chaque touche avec rage, sans réfléchir, rythmant ses pensées des petits claquements secs sous ses doigts, furieuse, hors de contrôle.
Petit à petit, le calme revint cependant. A midi, elle regarda sa montre, se leva, décrocha son gilet. Elle l'enfila, les yeux sur le fauteuil vide de XXX, et sortit.


Quand elles se retrouvèrent au début de l'après-midi, XXX dit posément :
Je ne crois pas en Dieu, parce que s'il existe, c'est dégueulasse, ce qu'il laisse faire sur la Terre. Regarde les gamins violés, les femmes battues, regarde tous ces pauvres gens qui galèrent pour leurs fins de mois, et les riches qui se goinfrent, tranquilles, pendant ce temps, et toutes ces racailles qu'on n'arrête même pas, ou qui ne font pas de prison... Et les maladies, et les guerres, et les famines aussi, et franchement, s'il y a Quelqu'un là-haut, qui regarde tout ça, et qui bouge pas le petit doigt, et que tu viens me dire « Il faut croire et accepter, t'en fais pas, tu seras récompensée... », ben chuis désolée, mais moi ça me va pas ! Et je préfère me dire que y a personne, plutôt que de prier un Dieu aussi cruel et injuste !
Elle s'arrêta net, un peu essoufflée, inquiète, étonnée d'avoir pu sortir sa tirade entière d'une traite. Mme T fixait son écran, qu'elle n'avait pas encore rallumé. XXX attendit un peu, puis plongea sous le bureau, appuya nerveusement sur le bouton de mise en marche, se rassit. Elle se mit au travail, très vite concentrée. Pour elle, l'incident était clos.
- Vous savez...
Elle sursauta, regarda l'heure au bas de son écran. 15H30. Mme T semblait n'avoir pas bougé depuis près de deux heures !
- Ce n'est pas vraiment que je crois en Dieu...
XXX attendait.
- Je crois ... qu'il y a une forme de justice. Je ne la comprends pas forcément. Je n'ai pas toutes les règles. Mais je crois, de toutes mes forces, en une sorte de … destin. Une responsabilité du sens que l'on donne à sa vie.
Elle leva les yeux. En face d'elle, XXX la fixait en silence.
- Vous êtes responsable. Si vous vous conduisez mal, vous serez punie. Et si vous vous conduisez bien, vous serez récompensée. C'est aussi simple que ça.
- Mais qu'est-ce qu'il a fait de mal, le gamin de deux ans que son beau-père a massacré à coups de poing hier soir ? Hein ? Tu peux me le dire ?
- Non je ne peux pas vous le dire, parce que je ne le sais pas. Je ne sais pas s'il a fait quelque chose de mal. Je ne sais pas pourquoi il en est mort. Je veux juste croire, fort, très fort, que son beau-père sera puni. Je ne sais pas par qui. Mais si je dois renoncer à y croire...
Mme T s'arrêta un instant, baissa les yeux. Les mots s'étranglaient dans sa gorge.
- Si je ne peux plus y croire... je ne peux plus continuer à vivre.
Elle regardait ses mains, croisées sur sa jupe grise. Le silence descendait doucement entre les deux femmes, de chaque côté du bureau. Puis quelqu'un frappa violemment à la porte, les faisant sursauter."

4 commentaires:

Madame Nicole a dit…

j'ai hâte de lire TOUT le livre

lolodelanormandie a dit…

bah? hé moi j'en suis qu'à livre 1 !!! oukison 2 et 3 ???
te papouille ma belle, je ne t'oublie pas !

Anonyme a dit…

rohhhh.... comme déjà j'aime ! (pas français mais m'en fous !). C'est "crô" bien, Tite Grenouille. Suis impatiente de lire la suite. Et ça résume tellement mon "pourquoi" je crois pas en Dieu.... MTSA

lorys03 a dit…

Bon, dans l'ordre :
-TOUT le livre, hum, comment dire, il fait actuellement 72 pages, pas vraiment fini hein !
- L1 publié, L2 en panne d'inspiration, L3 rédigé à moitié - manquent les photos et les délires
On arrive vite fait à L4 ;o) qui me hante ces temps-ci, histoire de contexte sans doute
Pi moi non plus je ne t'oublie pas, j'ai hâte de retrouver "une vie normale" pour pouvoir vous voir (à moins que tu ne descendes prendre une bouffée de soleil ?)
- ouais, on s'en fout, du moment que ça dit bien ce que tu veux dire !! En fait, c'est un morceau en plein milieu, je dirais aux deux tiers à peu près, ce sont les rouages qui expliquent les réactions des uns et des autres. Si je te mets la suite, tu n'auras aucun plaisir à lire le début !!

Pas simple, la forme "suspense", mais j'aime bien l'exercice !